Sobriété énergique : « On n’a pas attendu que Mme Borne nous donne un coup de pied dans le dos pour agir »
« Nous n’avons qu’un seul moyen, moins de consommation d’énergie. « Le discours d’Elisabeth Borne a fait l’effet d’une douche froide, lundi 29 août, devant l’Université d’été du Medef (La REF, Rencontre des Entrepreneurs de France). Face à la hausse des prix de l’électricité, et alors que l’Europe vit sous la menace des coupures de gaz russes, le Premier ministre a appelé les entrepreneurs à agir.
Elisabeth Borne demande aux énergéticiens des « plans sobriété » depuis septembre
Le seul moyen d’éviter les « coupures de gaz brutales » cet hiver, c’est que chacun « fasse sa part », a-t-elle insisté. C’est pourquoi le chef du gouvernement a demandé à chaque entreprise de préparer un « plan sobriété » d’ici fin septembre. Objectif : réduire la consommation d’énergie de 10 % en deux ans. Elisabeth Borne a également demandé la nomination d’un « sobriété officer » dans chaque entreprise. Car « si on arrive à la rationalisation », a-t-elle prévenu, « les entreprises seraient les premières touchées ».
Un discours modérément apprécié

Dans les couloirs de l’hippodrome de Longchamp, où se tient l’école d’été du Medef, le discours du premier ministre a été modérément apprécié. « Nous n’avons pas attendu d’avoir un coup de pied dans le dos de Mme Borne pour agir », a déclaré Patrice Pennel, patron du groupe industriel REG SAS – basé à Maubeuge, Lens et Lille, le groupe de 150 salariés spécialisé dans la vannerie de pointe et fabrication d’appareils mécaniques. Voir l’article : Comment avoir une maison autonome en électricité ?. « Notre premier objectif est d’être compétitif avec des concurrents étrangers qui paient moins cher leur énergie », explique-t-il.
« La fin de l’abondance » : Mais de quelle sobriété parle le gouvernement ?
C’est la raison pour laquelle Patrice Pennel réfléchissait dès juillet à la réduction de sa facture d’électricité, qui représente un coût de plus de 400 000 euros par an (gaz et électricité). « Pour l’essence, je ne suis pas inquiet. Nous parviendrons à réduire les consommations de 10%, notamment en optimisant le planning de chauffage des ateliers et en arrêtant les lieux de chauffage non occupés. « Mais ce sera beaucoup plus compliqué pour l’électricité.
« Une machine, on ne peut pas réduire sa consommation. On peut imaginer que la pièce nécessite moins de traitement, mais nous y avons déjà pensé. Et nos machines fonctionnent déjà très bien. Nous ne le changerons pas pour utiliser moins d’énergie. »
De son côté, une cadre dirigeante du secteur bancaire explique que son groupe partage l’objectif d’une plus grande sobriété. « Mais ce n’est pas toujours facile de traduire notre ambition en actes », déplore-t-elle. Par exemple, nous souhaitons faire basculer notre flotte vers des véhicules électriques moins énergivores, mais les constructeurs ont du mal à s’approvisionner, le délai d’attente est de deux ans. »
« On ne peut pas réinventer son modèle économique en deux mois »

Quant à Jean-François Faure, directeur d’Aucoffre.com, société d’achat et de stockage de métaux précieux basée dans la région bordelaise, il relativise l’impact du discours d’Elisabeth Borne. Voir l’article : Quelle est la batterie du futur ?. « Si un entrepreneur aujourd’hui seulement, en écoutant le premier ministre, se rend compte que l’énergie est un problème, il a raté quelque chose ! »
« La sobriété énergétique est notre meilleure assurance-vie »
Son entreprise est gourmande en serveurs informatiques, qui sont « extrêmement gourmands en énergie ». Cependant, ces serveurs appartiennent à des fournisseurs de services externes.
« Google et Amazon vont-ils réduire la consommation d’énergie de 10 %, comme le gouvernement nous le demande ? » Leur demandera-t-on de répondre aux mêmes objectifs que les entreprises françaises ? »
Aucoffre.com propose également une production artisanale de pièces en métaux précieux. « On ne peut pas baisser la température du four de 10 %, sinon le métal ne fondra pas », s’amuse Jean-François Faure. « Nous pouvons demander à notre partenaire d’éteindre un de ses fours. Mais ce n’est pas si simple : cela signifie-t-il que 10 % de ses effectifs seront à temps partiel ? A ses yeux, réduire la consommation d’énergie ne s’improvise pas : « On ne réinvente pas son business model en deux mois. »